Il est désormais bien ancré dans les esprits que le microbiote intestinal intervient dans notre immunité. Mais une question se pose encore : comment se fait la connexion ? Une étude récente englobant résultats in vitro et in vivo lève en partie le voile sur ce mystère.

 

Notre intestin, constitué d’une couche de cellules épithéliales, héberge en son sein une communauté microbienne qui vit en équilibre. Il s’agit du microbiote intestinal. Cet organe à part entière agit notamment comme effet barrière, permettant le passage sélectif de molécules dans la circulation sanguine. Cependant, certains éléments perturbateurs peuvent déséquilibrer cet écosystème. Cet équilibre rompu, autrement appelé dysbiose, peut entraîner une inflammation intestinale : le microbiote intestinal ne participe plus à nous protéger contre les agents pathogènes. S’ensuit alors la possibilité d’être atteint par diverses pathologies.

Une histoire de protéine anti-inflammatoire

Une protéine intestinale, la P-glycoprotéine (P-gp), semble permettre à l’intestin et au système immunitaire de communiquer à travers la paroi intestinale. La P-gp est un transporteur membranaire qui :

  • module l’efflux des toxines et xénobiotiques de la muqueuse vers la lumière intestinale ;
  • joue un rôle prépondérant dans la protection de l’épithélium intestinal, grâce à sa capacité à moduler l’inflammation.

En effet, la P-gp libère des molécules anti-inflammatoires : des endocannabinoïdes. Ainsi, en l’absence de maladie, la protéine est fortement exprimée à la surface des cellules épithéliales intestinales et exerce une influence dans la promotion de la santé de la barrière intestinale. À contrario, une faible concentration de la protéine est observée en cas de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI).

Comment favoriser l’expression de cette protéine ?

Fort de ces constats, les scientifiques ont cherché à déterminer le rôle du microbiote intestinal dans l’expression et la fonction de la P-gp. Grâce à leurs travaux sur les souris, ils ont identifié des bactéries appartenant aux genres Clostridia et Bacilli qui semblent en être capables.

Cette communauté bactérienne est notamment reconnue pour :

  • produire des acides gras à chaîne courte comme le butyrate (source d’énergie majeure pour l’épithélium intestinal) ;
  • convertir les acides biliaires primaires en acides biliaires secondaires. Ces derniers contribuent à l’homéostasie intestinale et à réduire l’inflammation.

Le butyrate et les acides biliaires secondaires sont donc des métabolites du microbiote intestinal agissant de concert pour promouvoir l’expression maximale de la P-gp fonctionnelle.

 

De plus, dans l’étude menée sur des patients atteints d’une MICI, la colite ulcéreuse, les chercheurs ont pu confirmer une baisse de la protéine P-gp dans cette population, couplée à la réduction des endocannabinoïdes anti-inflammatoires (résultats donnés en comparaison à des personnes saines).

Un espoir de traitement ?

Ces résultats confirment le lien entre l’équilibre du microbiote intestinal, le fonctionnement du système immunitaire et la santé intestinale.

 

La régulation de la P-gp par les micro-organismes intestinaux laisse entrevoir la possibilité de nouvelles thérapies pour soigner les MICI. Il ne serait pas insensé qu’à l’avenir, des probiotiques aptes à augmenter la P-gp puissent être proposés pour gérer ce type de pathologies.

LC

Références

Image : Freepik

FOLEY SE, TUOHY C, DUNFORD M, GREY MJ, DE LUCA H, CAWLEY C, SZABADY RL, MALDONADO-CONTRERAS A, HOUGHTON JM, WARD DV, MRSNY RJ, MCCORMICK BA. Gut microbiota regulation of P-glycoprotein in the intestinal epithelium in maintenance of homeostasis. Microbiome. 2021, 9(1):183