Après les microbiotes intestinal, vaginal, pulmonaire, cutané, oral… il est désormais temps de parler du microbiote des voies respiratoires supérieures. Les résultats d’une étude ont montré que nous hébergeons au sein de notre nez tout un écosystème qui pourrait nous protéger des infections respiratoires.

Le nez possède son propre microbote

C’est ce que montre les résultats d’une étude parue dans la célèbre revue scientifique Cell. L’hypothèse de départ est partie de l’expérience de vie de l’auteure de l’étude, le Pr Sarah Lebber. En effet, vu qu’aucun traitement ne semblait fonctionner pour soulager sa mère de ses maux de tête et sa sinusite chronique, cette dernière a été opérée. Trouvant dommage que personne ne se soit intéressée aux bactéries comme piste thérapeutique, le Pr Lebber a mené sa propre étude.

Les scientifiques ont alors comparé les bactéries du nez de 100 personnes en bonne santé à celles de 225 patients souffrant de rhinosinusite chronique. Résultats : près de 30 familles bactériennes sont présentes dans le nez. Un genre bactérien semble se démarquer chez les personnes en bonne santé : les Lactobacilles. Elles sont jusqu’à 10 fois plus abondantes dans certaines parties du nez chez les personnes saines par rapport aux patients malades ! Une espèce spécifique semble tirer son épingle du jeu : Lactobacillus casei. En effet, elle est absente dans les voies respiratoires supérieures chez près de 40% de patients malades.

Les Lactobacilles, une famille bactérienne capable de s’adapter à l’environnement nasal

Les Lactobacilles sont des bactéries bénéfiques : elles sont capables de produire de l’acide lactique permettant d’inhiber les agents pathogènes. Bien qu’elles soient souvent associées à des bactéries anaérobies strictes, c’est-à-dire qui se développent dans des milieux exempts d’oxygène (ce qui est tout le contraire du nez !), certaines sont aérotolérantes et se sont adaptées à l’environnement nasal (et plus particulièrement L. casei). Le séquençage génomique a mis en évidence l’existence de gènes permettant de faire face au stress oxydatif, et accepter l’oxygène. Lors d’une analyse microscopique, L. casei a également développé des fibres afin de pouvoir s’accrocher sur la muqueuse nasale et éviter son élimination rapide par le mucus.

Vers le développement d’un spray nasal aux probiotiques ?

Les chercheurs ont souhaité étudier un spray nasal contenant L. casei dans le but de prévenir les affections respiratoires dues notamment par Staphylococcus aureus, Haemophilus influenzae ou Moraxella catarrhalis.

Ce spray a été administré 2 fois par jour chez 20 volontaires sains pendant 2 semaines. Les bactéries présentes dans le spray ont rapidement colonisé le nez. Bien qu’aucun effet indésirable n’ait été détecté, les effets du spray n’ont pas encore été scientifiquement mesuré.

De prochaines études sont à mettre en place pour montrer l’efficacité du produit. Sujet à suivre de près…

LC

Référence

DE BOECK I, VAN DEN BROEK MFL, ALLONSIUS CN, SPACOVA I, WITTOUCK S, MARTENS K, WUYTS S, CAUWENBERGHS E, JOKICEVIC K, VANDERHEUVEL D, EILERS T, LEMARCQ M, DE RUDDLER C, THYS S, TIMMERMANS JP, VROEGOP AV, VERPLAETSE A, VAN DE WIELE T, KIEKENS F, HELLINGS PW, VANDERVEKEN OM, LEBEER S. Lactobacilli have a niche in the human nose. Cell Reports, 2020, 31(8) :107674