Après plusieurs années de travail et de discussion, la taxonomie du genre des Lactobacilles est modifiée. Ce changement va avoir de nombreuses conséquences qu’elles soient économiques, scientifiques ou réglementaires.

Pourquoi la taxonomie des Lactobacilles change-t-elle ?

Qu’est-ce que la taxonomie ? Il s’agit de la science qui classe, regroupe et nomme les organismes vivants.

La première description des Lactobacilles s’est faite en 1901 avec Lactobacillus delbrueckii, espèce indispensable à la production de yaourt. Au fur et à mesure, grâce aux nouvelles méthodes de séquençage génétique, il a été possible de recenser plus de 260 espèces différentes de Lactobacilles.

La diversité normale acceptée étant dépassée, il n’est plus possible de regrouper raisonnablement et de façon cohérente ces espèces du fait de la grande hétérogénéité que cela engendre : une reclassification est donc nécessaire. Selon la publication d’International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology (IJSEM) datant du 15 avril 2020, les Lactobacilles sont désormais limités à seulement 35 espèces. Les autres ont été dispersées puis regroupées en 23 nouveaux genres plus petits. Ce travail de reclassification fut donc titanesque !

Tous ces nouveaux genres :

  • répondent aux règles d’homogénéité entre les organismes
  • apportent plus de spécificités, assurant des preuves scientifiques plus solides et plus claires
  • sont stables à long terme
  • permettent d’accueillir de nouvelles espèces
  • commencent par la lettre « L »
  • conservent une ressemblance avec « Lactobacillus »

À titre d’exemples :

  • les espèces delbrueckii, acidophilus, gasseri, crispatus… appartiennent toujours au genre Lactobacillus
  • Par contre, rhamnosus, casei et paracasei appartiennent désormais au genre Lacticaseibacillus
  • plantarum et pentosus au genre Lactiplantibacillus 
  • reuteri et fermentum au genre Limosilactobacillus

L’université d’Alberta a créé un outil très utile afin de pouvoir rechercher les nouveaux noms de genres à partir des anciens (http://lactobacillus.ualberta.ca/).

Quels sont les différents challenges de cette modification de taxonomie ?

Un travail considérable est à envisager pour les entreprises travaillant dans le domaine des probiotiques, ainsi que pour les autorités.

En effet, cette reclassification entraîne une mise à jour des différents documents par les industriels (étiquetage, emballage, sites internet, documents techniques / qualité / commerciaux…).

L’EFSA, Santé Canada et la FDA utiliseront désormais les nouveaux noms dans leurs publications et communications, y compris pour les listes positives.

Les recherches scientifiques et les dépôts de brevets devront tenir compte de ces nouveaux noms. Lors de recherches bibliographiques, il sera important de chercher les publications avec les nouveaux mais aussi les anciens noms de genres.

La communication, interne et externe, sera également très largement impactée. Il s’agira d’une étape clé afin d’apporter les informations nécessaires à la compréhension que ce soit auprès des laboratoires, des professionnels de santé, des consommateurs ou encore des autorités réglementaires. Il faudra, par exemple, faire le lien entre des études cliniques évoquant l’ancien nom de genre avec un produit contenant le probiotique avec le nouveau nom de genre.

 

Ce travail de grande envergure est un changement important dans l’histoire des bactéries probiotiques. Et ce n’est qu’un début. Applicable à l’échelle mondiale, l’ensemble des parties concernées va devoir faire preuve d’adaptabilité et de pédagogie afin de comprendre, et faire comprendre, cette nouvelle taxonomie. Bien qu’elle ne soit pas exécutoire, elle est fortement encouragée.

LC

Références

PARKS DH, CHUVOCHINA M, WAITE DW, RINKE C, SKARSHEWSKI A, CHAUMEIL PA, HUGENHOLTZ P. A standardized bacterial taxonomy based on genome phylogeny substantially revises the tree of life. Nat Biotechnol. 2018, 36(10):996-1004 

SALVETTI E, HARRIS HMB, FELIS GE, O’TOOLE PW. Comparative genomics of the genus Lactobacillus reveals robust phylogroups that provide the basis for reclassification. Appl Environ Microbiol. 2018, 84(17)

ZHENG J, RUAN L, SUN M, GÄNZLE M. A genomic view of Lactobacilli and Pediococci demonstrates that phylogeny matches ecology and physiology. Appl Environ Microbiol. 2015, 81(20):7233-43